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Les pesticides vont-ils sauver le monde ?

Cet article est une traduction en français* de l'article "Pesticides: To do nothing is not an option" publié par l'organisation PAN Europe.

Face à l’entêtement du monde politique à être subordonné aux lobbies et à n’écouter ni les scientifiques, ni les citoyen.nes, CELL asbl a souhaité relayer cet article du Pesticide Action Network (PAN) Europe qui pose la question de l'utilisation des pesticides et de ses conséquences sur le vivant. Plus grave, l'UE a donné en novembre son feu vert à l'utilisation du glyphosate, et la menace qui pèse sur la planète n'a jamais été aussi forte.


Ce n'est plus un secret pour personne: les pesticides sont extrêmement nocifs pour l'homme et pour l'environnement. Il est désormais reconnu qu'il existe un lien entre l'utilisation régulière des produits chimiques phytosanitaires et certaines maladies humaines, ainsi que la perte de la biodiversité. La liste des conséquences graves induites par l'utilisation des pesticides est longue :


1. Toxicité pour les organismes non ciblés

Les pesticides sont conçus pour éliminer ou contrôler des organismes nuisibles spécifiques (par exemple, des insectes, des mauvaises herbes ou des champignons). Cependant, ils peuvent également avoir des effets néfastes sur des organismes non ciblés tels que les animaux, les plantes, les insectes pollinisateurs et les organismes aquatiques.


2. Résidus dans les aliments

Les résidus de pesticides peuvent persister sur les cultures traitées et être présents dans les aliments que nous consommons. Cela soulève des préoccupations quant à l’exposition humaine aux résidus de pesticides, en particulier si ces substances chimiques peuvent avoir des effets néfastes sur la santé humaine à long terme.


3. Résistance des organismes ciblés

L’utilisation intensive de pesticides peut conduire à l’émergence de populations d’organismes résistants, tels que des insectes ou des mauvaises herbes, réduisant ainsi l’efficacité des pesticides et nécessitant des doses plus élevées ou l’utilisation de pesticides plus puissants.


4. Impact sur la biodiversité

Certains pesticides peuvent avoir des effets négatifs sur la biodiversité en éliminant des espèces non ciblées importantes pour les écosystèmes, ce qui peut perturber l’équilibre naturel.


5. Contamination des sols et des eaux

Les pesticides peuvent s’infiltrer dans le sol et atteindre les nappes phréatiques, contaminant ainsi les ressources en eau. Cela peut avoir des conséquences sur la qualité de l’eau potable et sur les écosystèmes aquatiques.


6. Impacts sur la santé humaine

Certains pesticides ont été associés à des problèmes de santé humaine tels que des troubles neurologiques, des troubles hormonaux, des cancers et d’autres effets indésirables. Les personnes les plus exposées sont souvent les agriculteurs et les travailleurs agricoles.


7. Dégradation de la qualité du sol

Certains pesticides peuvent contribuer à la dégradation de la qualité du sol en affectant les micro-organismes bénéfiques et en altérant la structure du sol.



Face à ces enjeux, PAN Europe a publié une réaction au vote du Parlement Européen pour la réglementation des Pesticides.


Malgré cela, fin novembre a été terrible pour la santé, l’environnement, la raison et la démocratie.


Une majorité du Parlement européen a enterré le règlement qui aurait dû réduire de moitié l’utilisation des pesticides en Europe et interdire leur utilisation dans les aires de jeux et les écoles. En outre, les États membres de l’UE et la Commission ont donné leur feu vert pour 10 années supplémentaires d’utilisation destructrice du glyphosate.


Les responsables politiques ont choisi de ne pas s’attaquer à la crise très urgente de la biodiversité. Ils ont ignoré l’énorme quantité de preuves des effets néfastes des pesticides sur la santé et l’environnement [...]. Au lieu de montrer la voie vers un avenir plus positif, ils ont choisi de faire l’autruche et de ne rien faire. Ils ignorent leur responsabilité de protéger le bien-être et la durabilité de nos sociétés, ignorent les problèmes et mettent en danger l’avenir de leurs enfants, de leurs petits-enfants et des générations à venir.

Les responsables politiques ont choisi de ne pas s’attaquer à la crise très urgente de la biodiversité.

Les pesticides ne sont dans l’intérêt de personne!


- Pas dans l’intérêt des agriculteurs

Nous connaissons de mieux en mieux les effets très nocifs à long terme de ces substances toxiques auxquelles eux, leurs familles et leurs voisins sont exposés. La maladie de Parkinson est en augmentation et les agriculteurs en sont les premières victimes. Trop longtemps, les producteurs de pesticides et leurs nombreux conseillers, ainsi que leurs propres organisations représentatives, leur ont menti. L’industrie et ses actionnaires font des milliards de bénéfices en vendant des produits qu’ils savent beaucoup plus nocifs qu’ils ne l’admettent. C’est cette même industrie qui a orchestré la campagne visant à convaincre les responsables politiques de ne rien faire pour réduire les pesticides. Chaque réduction des pesticides réduit un peu leurs bénéfices, payés par les subventions publiques et les agriculteurs à qui l’on dit qu’il n’y a pas d’alternative. Les agriculteurs pourraient avoir une activité beaucoup plus rentable s’ils pouvaient réduire les coûts des intrants externes et s’ils étaient récompensés par un prix juste pour un produit sain.


- Pas dans l’intérêt des consommateurs

Le choix de ne pas réduire les pesticides n’est pas non plus dans l’intérêt des consommateurs. Ils mangent des produits contaminés par un cocktail de pesticides. Chacun d’entre eux peut être en dessous de la limite réglementaire, les preuves disponibles sur l’effet cocktail de tous ces produits chimiques combinés sont très inquiétantes, et les régulateurs refusent de mieux protéger les citoyens contre les mélanges toxiques. L’agro-industrie menace souvent les consommateurs et les responsables politiques d’augmenter les prix des denrées alimentaires si les pesticides sont réduits. Ce message alarmiste est diffusé chaque fois qu’un pesticide est interdit : néonicotinoïdes toxiques pour les abeilles, chlorpyrifos nocif pour le cerveau... mais après chaque interdiction, les rendements restent les mêmes et les prix n’augmentent pas.


Or, il existe de nombreux moyens de garantir une alimentation saine à un prix équitable. Nous avons tendance à oublier que le prix réel des aliments est bien plus élevé. Le coût de l’élimination de la contamination de notre eau potable par les pesticides et le coût des soins de santé pour traiter les maladies causées par l’exposition aux pesticides des citoyens ruraux et par l’ingestion d’aliments malsains sont énormes. Les produits fabriqués avec des pesticides sont extrêmement subventionnés, car la société paie pour tous les dommages causés par ce mode d’agriculture. Ils seraient beaucoup plus chers que les produits biologiques si les coûts réels étaient pris en compte.


Une redistribution de l’argent de la PAC vers les agriculteurs qui s’engagent à réduire l’utilisation des pesticides et vers ceux qui nourrissent réellement la population, garantirait un prix équitable tant pour les citoyens que pour les agriculteurs.

En outre, l’agriculture dans l’UE est fortement subventionnée : un tiers du budget de l’UE (55 milliards d’euros) est consacré à la politique agricole commune. Une part considérable de cet argent finit dans les poches des actionnaires des entreprises de pesticides ou des acteurs de l’industrie agroalimentaire. Une petite partie de cet argent finit vraiment dans la poche de ceux qui nous nourrissent vraiment avec des aliments sains et biologiques, comme les producteurs de fruits et de légumes qui ont généralement de faibles marges de profit. Une redistribution de l’argent de la PAC vers les agriculteurs qui s’engagent à réduire l’utilisation des pesticides et vers ceux qui nourrissent réellement la population, au lieu de produire des marchandises, garantirait un prix équitable tant pour les citoyens que pour les agriculteurs.



- Pas dans l’intérêt de notre avenir commun

La voie à suivre consiste à passer de l’ère des produits chimiques polluants à une nouvelle ère de production d’aliments sains, sans contamination et avec une restauration de la fertilité des sols et de la biodiversité

Le choix de ne pas réduire les pesticides nuit à notre avenir commun. Nous sommes au cœur d’une crise de la biodiversité encore plus avancée que la crise climatique. Sans biodiversité et sans sols sains, nous ne pouvons pas produire de nourriture à long terme, et la sécurité alimentaire est donc en jeu. La majeure partie de l’agriculture européenne est enfermée dans un système sans issue. Les pesticides tuent la biodiversité, la santé des sols et polluent l’eau. Ils réduisent la capacité des sols à stocker le carbone et à retenir l’eau, deux éléments essentiels pendant les périodes sèches et très humides. Cette forme d’agriculture ne résiste pas du tout au changement climatique. Les coûts réels de ce désastre ne font que commencer à apparaître. Six mille scientifiques ont exhorté les responsables politiques à prendre des mesures pour restaurer la nature et réduire l’utilisation des pesticides.


La voie à suivre consiste à passer de l’ère des produits chimiques polluants à une nouvelle ère de production d’aliments sains, sans contamination et avec une restauration de la fertilité des sols et de la biodiversité, tout en stockant le carbone dans le sol. C’est là qu’il faut concentrer tous les efforts, là où il faut investir tous les fonds publics destinés aux subventions agricoles et à la recherche. Les conservateurs de la fraction PPE du Parlement européen ont provoqué cette crise politique, avec le soutien des libéraux et des partis populistes. Ils ont agi à courte vue et ont essayé de sauver leur peau politique en étant plus populistes que les populistes. Ils ont très bien servi les intérêts de l’industrie chimique. Mais ils ne servent pas les intérêts des agriculteurs qu’ils prétendent protéger, ni les intérêts des citoyens.


Ne rien faire n’est pas une option


Ignorer la science et la volonté de la population tout en laissant prévaloir les intérêts de l’industrie et de ses actionnaires est une démarche dangereuse. Elle favorise le discrédit de l’ensemble du système politique. Ignorer les vrais problèmes et désigner des boucs émissaires dans la société, comme le font les partis populistes, est dangereusement antidémocratique. Y céder ne fait que servir les intérêts particuliers de l’industrie au lieu de résoudre les problèmes et ouvre la voie à un avenir sombre et malsain. Nous pensons que les hommes politiques peuvent et doivent faire beaucoup mieux.


Source: "Pesticides: To do nothing is not an option", PAN Europe


*A l'exception de l'introduction et des parties 1 à 7, par CELL/Karine Paris


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